Sortir de l'accaparement du monde

mardi 05 octobre 2010
Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 10,38-42.
Alors qu'il était en route avec ses disciples, Jésus entra dans un village. Une femme appelée Marthe le reçut dans sa maison.
Elle avait une sœur nommée Marie qui, se tenant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole.
Marthe était accaparée par les multiples occupations du service. Elle intervint et dit : « Seigneur, cela ne te fait rien ? Ma sœur me laisse seule à faire le service. Dis-lui donc de m'aider. »
Le Seigneur lui répondit : « Marthe, Marthe, tu t'inquiètes et tu t'agites pour bien des choses.
Une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part : elle ne lui sera pas enlevée. »

Cette meilleure part, qui semble séparer Marthe de Marie, ne désigne pas l'impossibilité d'accéder à la sainteté par les occupations extérieures. Mais c'est "l'accaparement" de Marthe qui fait dire à Jésus que Marie a choisi la meilleure part. J'ai consulté le dictionnaire au verbe "accaparer" - et la définition est très éclairante : accaparer, c'est retenir de manière exclusive l'attention de quelqu'un (exemple: "il est accaparé par son travail"). Mais les saints accomplissaient une multitude de travaux tout en conservant "la meilleure part". Sainte Faustine, dont c'est la fête aujourd'hui, effectuait toutes sortes de travaux dans le couvent (comme portière ou dans les travaux ménagers ou à la cuisine) sans jamais sortir de l'attention accordée au Seigneur. Car dans une vie qui tend vers la sainteté, aucune action, aucun travail - et pas même le repos du corps, l'absence d'activité - ne peut suspendre la relation entre l'âme et Dieu.

Je citais hier Maître Eckhart: "N'ayez plus de soucis : le Seigneur est tout près et Il est proche. Il faut nécessairement, pour que l'âme se réjouisse dans le Seigneur, qu'elle laisse tout souci, au moins dans l'heure où elle s'adonne à Dieu. C'est pourquoi saint Paul dit: n'ayez plus de soucis, car le Seigneur est tout près, proche de nous, c'est-à-dire au plus intime de nous-mêmes, quand il nous trouve chez nous et quand l'âme n'est pas sortie pour badiner avec les cinq sens. L'âme doit être chez elle dans ce qu'elle a de plus intime, et de plus élevé, et de plus pur, et rester en tout temps à l'intérieur sans regarder au dehors: là, Dieu est tout près et Dieu est tout proche".

Et j'ajoute cette autre citation aujourd'hui, car elle me montre comment je peux être distrait tout en priant, et présent à Dieu tout en travaillant. Car c'est la disposition de l'âme qui compte: "Dieu est prêt à tout moment, mais nous ne le sommes pas du tout. Dieu est près de nous, mais nous sommes loin de lui. Dieu est dedans et nous sommes dehors. Dieu en nous est chez lui, nous sommes des étrangers." mais: "Quand le Verbe parle dans l'âme, et que l'âme répond dans le Verbe vivant, le Fils devient vivant dans l'âme".

Et donc l'idée, qui naît souvent chez les convertis dans la joie des premiers moments, d'accomplir de grandes choses pour le Seigneur... cette idée ne mène pas bien loin, car il s'agit toujours de laisser Dieu accomplir en nous Son dessein. Et certes, le renouvellement d'une âme et son adhésion à la volonté divine, voici une grande oeuvre, mais ce n'est pas celle-là que le monde peut reconnaître.