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LAURENT JOFFRIN - LE ROI EST NU

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Message par Joss Lun 7 Avr 2008 - 15:47

Sarkozy par Joffrin

Dans un petit ouvrage charpenté, « Le roi est nu » (Robert Laffont), Laurent Joffrin, le directeur de la rédaction de Libération, développe une thèse très polémique.

Et si, sous le discours volontariste de la réforme, Nicolas Sarkozy n’était qu’un homme du passé, sorte de Louis-Philippe, les Ray-Ban en plus, adepte d’une « subreptice Restauration » , que ce soit dans son rapport à l’argent ou lorsqu’il affirme que jamais l’instituteur ne pourra remplacer le curé ? D. D.

Extraits


Monsieur le président,

Je vous fais une lettre... ... Vous avez voulu mettre la présidence à portée des citoyens, vous n’avez fait que l’abaisser. Ce qui vous semble de la décontraction apparaît comme de la désinvolture. Comme métier, dites-vous, vous « faites président », comme vous « feriez avocat ». Eh non ! Ce n’est pas un métier, c’est une charge. Il ne faut pas seulement en connaître les ficelles. Il faut en remplir les devoirs. [...]

Vous avez répété maintes fois que vous vouliez incarner une « droite décomplexée ». Vous portez des Ray-Ban, vous ne quittez pas votre portable et vous parlez des défis du siècle nouveau. Mais les Ray-Ban, il faut vous le rappeler, datent de 1936. Elles sont revenues à la mode dans les années 70 ; avec le succès du film « Easy Rider », puis une nouvelle fois à la fin des années 80. Ce sont des lunettes voyantes mais qui renvoient au passé. Elles vous résument très bien : par les symboles affichés, les discours tenus, les décisions prises, vous vous rattachez à une conception de la droite-et de la France-qui n’a plus cours depuis la Libération, sinon depuis le XIXe siècle. [...]

Vos convictions, maintes fois affirmées dans vos livres et dans vos innombrables discours, forment un noyau idéologique bien identifié. Fondé sur les valeurs les plus anciennes de l’autorité et du laisser-faire économique mélangés, le sarkozysme est avant tout un autoritarisme droitier inédit en France depuis des lustres. La rupture dont vous vous réclamez, c’est la double rupture avec le gaullisme et, plus largement, avec le progressisme relatif qui animait la classe politique depuis la Libération, même au sein du camp conservateur. Quoique né dans le parti du Général, vous en avez oublié les principes pour les troquer contre un néoconservatisme qui nous renvoie au double héritage de Louis-Philippe, pour la fascination de la richesse, et des Bonaparte, pour la méthode d’exercice du pouvoir. Je crains maintenant que vous ne vous entêtiez dans cette voie néfaste. Il est donc temps de le dire avec éclat : le roi va régner encore pour quatre ans. Mais le roi est nu.

La restauration


L’ouverture est avant tout une posture. Une posture de bon aloi, mais qui ne peut masquer l’essentiel : il s’agit bien d’un ralliement né de l’habilité d’un seul et de l’ambition des autres et non (du) soudain rassemblement au centre de la politique nationale. De la même manière, plusieurs réformes furent amendées en fonction des résistances rencontrées ou négociées préalablement avec les organisations représentatives, telle la réforme universitaire ou celle des régimes spéciaux de retraite. D’autres s’imposaient et, si elles furent menées à la hussarde, elles étaient néanmoins nécessaires-on pense à la carte judiciaire ou bien à la fusion de l’ANPE et de l’Unedic, dont chacun s’accorde à reconnaître la pertinence de principe, sinon de modalités. [...]

Les premiers mois de Nicolas Sarkozy à l’Elysée, il faut le craindre, disent la vérité. Une vérité crue et inquiétante. Avec un tantinet de recul, on s’aperçoit-et l’opinion aussi-que le nouveau souverain à l’activisme chatoyant est lancé dans une entreprise étrange de résurrection du passé. Sous prétexte de transgression salutaire, d’audace modernisatrice, d’énergie et de refus du « politiquement correct », on organise la régression.

L’argent roi

Le style, c’est le président. Nicolas Sarkozy trouve parfaitement naturel de s’afficher avec des milliardaires. Il voit bien qu’il choque, mais il n’en a cure. Les Français, pense-t-il, doivent cesser de déprécier l’argent tout en le jalousant. Ils doivent voir la mondialisation en face et sa nouvelle échelle des valeurs qui place au sommet les corsaires de l’industrie ou de la finance, qui révère l’entreprise et porte au pinacle les maîtres du capitalisme. Nous sommes en économie de marché, que diable, il est temps de s’en rendre compte ! [...]

Voilà bien la France frileuse qui a honte de la réussite, qui dénigre le succès. Ceux-là ont travaillé plus, ils ont gagné plus. Foin des préjugés. La richesse n’est pas un crime. Elle est la récompense des entrepreneurs, dont nous avons tous besoin. Alors, vive le Fouquet’s !

Mais non, monsieur le président. Vous vous trompez. Les riches n’ont nul besoin de réhabilitation. [...] Pour une raison simple : l’argent a réussi depuis longtemps son adoubement dans l’imaginaire français. Et c’est la gauche qui le lui a offert !

Après le « tournant de la rigueur » de 1983, quand elle abandonne officiellement l’ancien programme de rupture avec le capitalisme, cette gauche qu’on pensait rouge provoque le grand changement des mentalités, la grande réconciliation avec le système. Soudain, on admet le profit, on favorise l’entreprise, on légitime le marché. [...] Un geste résume tous les autres : elle porte au gouvernement l’homme qui symbolise ce retour en grâce des riches, Bernard Tapie. [...]

Attaché de presse du CAC 40


Individualiste, américanophile, ami des patrons, Nicolas Sarkozy est en économie un libéral-né. S’il fait des concessions au dirigisme à la française et au discours social du gaullisme, c’est pure conjoncture. Son culte de la réussite, son énergie dans la lutte, son sens de la concurrence, sa brutalité affichée dans la compétition, tout le porte à accepter, à désirer un système qui sourit aux forts. Son style colle à son itinéraire. [...]

La place éminente ménagée aux riches dans la République par Nicolas Sarkozy, présentée sous l’enseigne de la modernité économique, nous ramène en fait aux années 30, voire au XIXe siècle, quand les grands barons de l’industrie et de la finance, qui étaient aussi ceux des médias, exerçaient une influence majeure sur la formation de l’opinion et sur la politique économique. La gauche fustigeait « le pouvoir des deux cents familles », formule qui désignait les représentants du capitalisme français. [...] Le général de Gaulle se méfiait du capital, dont le comportement pendant la guerre ne l’avait guère édifié. Il professait en matière économique une doctrine inspirée du christianisme social. Ses successeurs avaient maintenu, à des degrés divers, cette distance prudente entre grand capital et politique. [...] Sarkozy a choisi la rupture. Sa « droite décomplexée », c’est aussi celle qui paie l’impôt sur les grandes fortunes. S’il n’est pas l’émissaire des deux cents familles, il est en tout cas l’attaché de presse du CAC 40.

Le curé et l’instituteur

Escortant le diablotin qui s’est hissé à l’Elysée, Dieu a fait son retour sur la scène politique nationale. A la différence de tous ses prédécesseurs, Nicolas Sarkozy aime parler de la foi. Longtemps ministre des Cultes, auteur d’un livre sur la République et les religions, il a sur ces questions des idées bien arrêtées. Ses conceptions sont intéressantes, réfléchies, elles alimentent le débat. L’ennui, c’est qu’elles sont contradictoires avec la tradition de laïcité qui prévaut en France. [...]

« Je préfère que mon jardinier croie en Dieu, il me volera moins », disait Voltaire, anticlérical qui avait lui aussi une conception utilitaire de la religion. Je préfère que les Français croient en Dieu, pense Sarkozy, ils se tiendront plus tranquilles.

Conception cynique, mais surtout archaïque. L’expérience de l’histoire moderne montre en effet que la démocratie n’a nul besoin, en priorité, d’une spiritualité religieuse pour survivre et s’épanouir. [...] La démocratie est un régime solide, qui se tient debout par lui-même, avec ou sans le secours de la religion. Les croyants s’y sentent respectés, garantis qu’ils sont dans leur liberté par le principe de laïcité ( « secularism » dans le monde anglo-saxon). On ne se repose pas sur eux pour régenter l’ordre social. Cette idée avait cours au XIXe siècle. Elle était tombée en désuétude dans les cercles dirigeants jusqu’à ce que Nicolas Sarkozy l’exhume. [...] Il existe une transcendance démocratique-ou républicaine-que Nicolas Sarkozy sous-estime
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