MARTHE ET MARIE


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N'oublie pas les chevaux écumants du passé

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Message par Fée Violine Lun 12 Mai 2008 - 21:38

l'année dernière, j'ai parlé ici du dernier livre de Christiane Singer
https://marthetmarie.1fr1.net/temoignages-divers-f6/derniers-fragments-d-un-long-voyage-t835.htm#11448

Du même auteur, je viens d'en lire un autre, que j'ai adoré aussi, N'oublie pas les chevaux écumants du passé, éd Albin Michel, 2005.
Il s'agit de la transmission, de la gratitude, du rapport au passé, de l'essentiel.
Comme on me l'a prêté, j'ai copié des passages avant de le rendre, et bien sûr je vous en fais profiter :

"Ah cessez d'être pauvres et retournez à vos trésors ! "(Rabbi Nahman)

le Manifesto del futurismo de Marinetti, 1909 :
"Nous détruirons les musées, les bibliothèques, les académies ... ces cimetières... Nous n'avons pas besoin du passé... Nous sommes jeunes et forts... La guerre représente la forme la plus intense de la vie".
(...)
Sans connaissance, sans vision et sans fertilité imaginaire, toute société sombre tôt ou tard dans le non-sens et l'agression.
Il existe à ce jeu macabre un puissant contre-poison.
A portée de la main, à tout instant : c'est la gratitude.
Elle seule suspend notre course avide.
Elle seule donne accès à une abondance sans rivage.

A force de traiter les oeuvres d'art comme de la matière et non comme des visions hissées jusqu'à la visibilité, on perd la trace de l'essentiel : le lieu où la vision a germé, a surgi, s'est déployée. C'est à ce lieu qu'il faut s'attarder. C'est celui de notre humanité co-créatrice, la grande pépinière de l'aujourd'hui. (...) Il faut répéter sans se lasser que ce qui existe sur terre n'est qu'une ombre du possible. (...) Ce qu'il y a de toute urgence à transmettre est invisible.

...la seule maladie vraiment mortelle : le désintérêt, l'incuriosité.

L'erreur la plus courante en éducation consiste à partir du plus bas, du plus réduit, du plus pragmatique ; elle est souvent irréparable. (...)
Est-il surprenant que devant tout ce qui n'est que fonctionnel et flaire le système, l'enfant se rétracte ?
Il n'est qu'une manière de débuter dans le savoir et sa saveur : c'est d'être ébloui ! Tout ce qui ne commence pas par un éblouissement n'a pas d'avenir.
Il n'y a que le meilleur qui soit défendable. Cette lèpre de notre époque, ce souci de tout rabaisser pour être soi-disant à la portée de chacun, est une machination criminelle. (...) En nivelant, en faisant une fausse démocratie de la médiocrité, il n'y a que des perdants.

"Je hais les miroirs et la fornication car ils multiplient le nombre des hommes " (un hérésiarque du 14ème siècle, cité par Borgès).
C'est de cette horreur de la chair que s'originent le rejet de l'autre, le sectarisme et la xénophobie : le nouveau venu, l'étranger, est celui qui dérange le privilège du premier venu, qui fait du bruit, partage l'air à respirer, y répand une odeur inconnue. Car, étrangement, ce n'est pas tant sa propre naissance qui dérange le dénigreur de la vie, c'est bel et bien celle de l'autre.

Si la tour de Babel est une sanction divine contre la volonté de puissance des hommes, elle est aussi une bénédiction. Une humanité hétéroclite et bigarrée est la meilleure garantie contre son unification féroce. De la pax romana à la pax americana, l'abomination d'un ordre unique a fait son temps.

Toute rencontre véritable modifie quelque chose en moi. S'il n'y a pas un changement, aussi ténu soit-il en apparence, un glissement délicat, il n'y a pas eu rencontre.
"Je suis un Brésilien de pure race, c'est-à-dire un mélange de Portugais, de Noir, d'Indien, d'Italien, peut-être aussi d'Allemand et de Juif" (Jorge Amado).

Une conviction m'est acquise : toute forme de rejet de l'autre, de racisme et de xénophobie a toujours la même origine : une crasse ignorance et une atrophie de la fonction d'imagination. La curiosité intellectuelle, sensuelle et vivante est le seul puissant anticorps.

"La seule valeur absolue, le contenu même de toute foi est le fait de donner priorité à l'autre sur moi-même" (Emmanuel Lévinas).
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Message par Fée Violine Lun 12 Mai 2008 - 22:00

(suite)

...la tolérance, ce formidable trompe-l'oeil qui dissimule aux regards la paresse du coeur. "Je te tolère pour n'être pas obligé de te rencontrer - et surtout ne pas me voir contraint de te respecter ou de t'aimer !"
Cette tolérance qui englobe tout le monde sans croiser un seul regard contredit la dynamique transformatrice. Nous ne sommes pas appelés à nous tolérer les uns les autres mais à nous rencontrer.
D'où la fragilité d'une déclaration d'"égalité naturelle des hommes". Cette humanité sous le boisseau flaire le marché global. (...) Il faut oser le voir : les hommes sont profondément différents les uns des autres. De même que les cultures. S'ils sont égaux, c'est en différence. La déclaration mérite d'être formulée de neuf : tous les hommes sont différents. Personne ne peut être contraint - ni contraindre un autre - à être moins différent que tous les autres.
Voilà la charte du respect vécu.
Vivre ensemble !
Ne nous leurrons pas ! La tâche est immense et décourageante. Elle est néanmoins notre vocation.
(...) "Si tu penses comme moi, tu es mon frère. Si tu ne penses pas comme moi, tu es deux fois mon frère car tu m'ouvres un autre monde" (Hampaté Bâ).

Certains mots sont étrangement dans toutes les bouches lorsque la réalité qu'ils recouvrent est abolie, ainsi la "démocratie" qu'il s'agit de porter à l'Irak.

"J'avais soif et faim d'absolu.
J'ai quitté le monde pour sauver les créatures.
J'ai quitté le monde pour atteindre à l'Illumination. J'ai quitté mon père et ma mère et les miens.
J'avais soif et faim d'absolu.
Puis j'ai compris que je ne serais apaisé que si j'apprenais à aimer aussi la saleté, la poussière et les passions.
Il est facile de se révolter contre la réalité. Il est plus difficile de la vivre.
Aussi, je suis revenu dans le monde" (un moine à Dharamsala).
(...)
Si c'est la peur qui nous fait rêver d'un monde sans violence, nous y programmons aussitôt la violence.
"Qui préfère la sécurité à la liberté aura vite fait de perdre les deux" (Benjamin Franklin).

A la question : "Que puis-je faire pour le monde ?", Suzuki Roshi répondait : "Clean up your own corner".
De ce "coin nettoyé" jaillit la source.

Cette part de moi qui n'a ni qualité, ni propriété, ni attribut, qui échappe à toute catégorie, qui ne connaît ni peur ni jugement, c'est la substance de notre vraie nature.
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Message par Cécile Mar 13 Mai 2008 - 4:17

Merci pour ce beau texte !

Il est très dense... Je relève la phrase qui est peut-être la plus simple :

A la question : "Que puis-je faire pour le monde ?", Suzuki Roshi répondait : "Clean up your own corner".
De ce "coin nettoyé" jaillit la source.
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Message par Fée Violine Mar 13 Mai 2008 - 17:51

ce n'est pas un texte qui se suit, ce sont des extraits pêchés un peu partout dans le livre.
D'ailleurs il y en a encore.
Je trouve qu'il y a de quoi faire plein de débats.
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Message par Fée Violine Mar 13 Mai 2008 - 22:16

(suite)

"Qui confond féminin et masculin commet un attentat contre les mondes en gestation " (RM Rilke).

Là où les jardins secrets, les palissades, les haies vibrantes d'oiseaux sont saccagés, c'est l'ère de la barbarie qui commence.

"Le rêve de la démocratie est d'élever l'ouvrier au niveau d'imbécillité du bourgeois" (Flaubert).

"Qui épouse l'esprit du temps sera vite veuf" (Kierkegaard).

Tout ce qui fait la nature singulière des femmes est déprécié. Pire : arraché au secret naturel de l'être et exposé à la lumière crue des projecteurs. Les cycles lunaires qui les relient aux mouvements des planètes, la silencieuse alchimie de la gestation, la métamorphose de la fécondité matricielle en fécondité de l'esprit. Tout cesse d'être vécu par les femmes comme une haute distinction pour devenir entrave ou handicap dont la recherche génétique a promis de les délivrer.
C'est dire que la sujétion chimique et médicale a pris sans transition le relais des soumissions parentales ou conjugales d'autrefois. Charybde le cède à Scylla.

...la faculté qu'ont les femmes, quand elles sont rendues à elles-mêmes et à leur vie intérieure, d'accueillir ce qui est, ce qui vient, ce qui se présente - de si royale manière qu'elles n'ont plus à subir quoi que ce soit. (...) Tout ce qui n'est pas coté en Bourse est au creux du féminin : le temps suspendu, la patience brûlante, le silence, le don, la gratuité, l'éros de l'attente, le passage obligé par des morts multiples en cours d'existence et la mort.
C'est à cette aventure exigeante, austère et radieuse que nous sommes conviés.

Le monde dans lequel nous vivons est une entreprise colossale de détournement. Une incroyable machine est en marche pour nous divertir en permanence. (...) Deepak Chopra a forgé la forte notion d'"hypnose socialement programmée" pour décrire notre état de conscience collectif. Ce que nous prenons pour la réalité est une construction parfaitement artificielle, une cage aux barreaux invisibles. La réalité réelle, la vraie vie, avec ses saveurs, ses odeurs, ses fulgurances, respire derrière cette structure.

Dès que je manie la critique, je sens s'aggraver l'irritation, et en même temps j'ai conscience que c'est cette irritation même qui crée l'adversaire ! Les deux vont ensemble. Cette indignation que je laisse monter en moi donne une énergie colossale au léviathan qui se tient devant moi. Ainsi me place-t-il où il veut m'avoir : dans la réaction - c'est-à-dire dans la guerre.

Quand nous entrons en amour, toutes les catastrophes nous guettent. Pourquoi ? Parce que nous nous leurrons. Nous croyons que l'amour vient de nous être octroyé par la personne que nous aimons - et que cette personne détient l'amour. Or l'amour n'est aux mains de personne. Ni entre mes mains, ni entre les siennes. Il est entre nous. Il est ce qui, entre nous, s'est tissé depuis notre première rencontre, ce que l'espace insaisissable entre nous a engendré et continue d'engendrer d'instant en instant. Une oeuvre fluide et perfectible à l'infini.
(...) la voie est dans la vigilance - une vigilance de tout notre être, vibrante. Nos sens sont le plus souvent devenus des tentacules qui tentent de tirer le monde à eux pour le posséder. Il est temps qu'ils redeviennent des antennes, les antennes du vivant et que notre corps entier s'ennoblisse.
Cet élan, cette ouverture de tout l'être nous rendent perméables à l'essentiel.
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Message par Fée Violine Ven 16 Mai 2008 - 19:02

(suite et fin)

Savoir qu'une qualité dont j'étais dépositaire ne se perdra pas est devenu une source de joie inépuisable.
(...) Dans l'avancée de la maturité et l'approche de la vieillesse, il est un autre phénomène qui frappe : le rajeunissement progressif du coeur et de l'âme.
(...) La jeunesse transbahute tous les préjugés qu'on lui a inculqués, les jugements féroces, les catégories assassines. Elle est souvent dure comme le monde qui l'accueille. Sa lumière est sous le boisseau. (...)
"Il faut toute une vie, écrit Jean Sulivan, pour élargir son coeur, ses opinions, pour conquérir sa liberté spirituelle".
(...) Le monde existe vraiment !
Voilà la révélation. (...)
Que cette sensation ne se laisse pas décrire n'est pas une raison de ne pas le tenter.
(...)
Un jeune élève interroge le maître :
"Rabbi, autrefois il est dit que les prophètes parlaient à Dieu face à face, de visage à visage. Pourquoi cela ne se produit-il plus ?
- Parce que les hommes, mon fils, ne s'inclinent plus assez bas".

****

et le livre s'achève sur une citation de Rabbi Nahman :
"Vous ne savez pas à quel point vous ne savez pas ce que vous ne savez pas".

****

:fleurette: :fleurette: :fleurette: :fleurette: :fleurette: :fleurette: :fleurette:

PS. Le titre, "N'oublie pas les chevaux écumants du passé", est un adage japonais.
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