MARTHE ET MARIE


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Le Journal de Julien Green

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Message par etienne lorant Mar 7 Déc 2010 - 15:34

28 novembre 1967
Aujourd'hui, conversation à la radio avec Jean-François Noël. Je lui dis: "N'est-il pas curieux qu'en 1967, on puisse attirer l'attention sur soi en parlant des vérités du catéchisme ? On a l'air d'un étranger venu d'un pays lointain et qui garde l'accent de ces régions-là. Je lui cite des phrases de Nietzsche sur le souffle du vide qui frappe le visage de l'incroyant, puisque "Dieu est mort"

Note personnelle: Je me souviens d'une réflexion de Dostoïevski qui écrivait : "A partir du moment où les hommes auront déclaré "la mort de Dieu", il se jetteront les uns sur les autres pour s'embrasser comme s'ils voulaient se consoler, et ils se mettront à chérir et à vouloir protéger le moindre brin d'herbe." Je considère la question de l'écologie comme un sujet important, certes, mais cela ne va pas plus loin, pour moi, que d'essayer de trier mes déchets. Cependant, je connais certains militants écologiques pour qui l'écologie est devenue une forme de religion à part entière, comme s'ils se disaient, nous n'avons pas pu croire en Dieu, alors essayons de croire en la terre ? Mais cela me semble en même temps dérisoire et pitoyable...

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Message par etienne lorant Mar 7 Déc 2010 - 15:38

26 décembre 1967
"Lu dans le père Lallemant une page d'une concision remarquable qui résume selon moi toute vie spirituelles : "Il n'y a que Dieu qui ait droit de souveraineté sur les cœurs. L'Église même n'étend pas jusque-là son domaine. Ce qui s'y passe ne relève point d'elle. Dieu seul en est le Roi... C'est là qu'il établit le trône de sa grâce... Dieu s'applique plus au gouvernement surnaturel d'un cœur où il règne qu'au gouvernement naturel de tout l'Univers... Il n'y a que Dieu qui puisse contenter notre cœur. Notre cœur a un vide qui ne peut être rempli que de Dieu. Les délices de Dieu sont de converser avec les cœurs. C'est là son lieu de repos. Heureuse la vie intérieure qui fait vivre Dieu seul dans les cœurs."

Note personnelle: Puisse donc Dieu régner dans mon cœur de plus en plus. Car le vide qui est dans mon cœur est de plus en plus le vide, à mesure que toutes les autres relations sont chargées d'inquiétudes, de reproches, de peurs, de suspicions. Il y a trois semaines, quand j'ai décidé d'un seul coup, de trancher au vif dans les liens déjà très amoindris d'avec mes sœurs, c'est que j'avais entendu - six fois au cours d'un seul appel téléphonique, le mot de "colère" (car de nos jours, il n'est même plus nécessaire d'explications, de discussion, le mot de colère justifie tout.) J'ai donc conclu aussitôt que c'en était fini des tentatives de rapprochement étalés sur plus d'une dizaine d'années. J'ai dit ce que j'avais à dire et cela fut dit en moins d'une minute. Mais j'ai prié une partie de la nuit qui a suivi je me suis arrêté de compter après trente dizaines de chapelet... je me suis finalement endormi.) Le lendemain matin, j'ai repris le travail comme à l'ordinaire et je me plaignais déjà de n'avoir pas reçu de réponse à ma prière lorsque j'ai ressenti, très fortement: "Désormais, il te faut mourir à toi-même".
Au même moment, j'ai eu la connaissance de ce que cela voulait dire: je dois me dépouiller de mes dernières affections que le monde dit 'légitimes': famille, conjoint, amitiés et jusqu'aux décors du passé... Désormais, il faudra aimer ce prochain à propos duquel Simone Weil déclarait avec une très grande clarté: "Pour aimer un étranger comme soi-même, cela présuppose de se considérer soi-même comme un étranger. Il faut la foi, la prière, la discipline - et Dieu viendra combler ce vide si pénible à endurer pour le moment.
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Message par etienne lorant Mar 7 Déc 2010 - 15:40

28 décembre 1967
"Quelque chose en moi se jette en avant dans le siècle qui vient et dont je n'arrive pas à voir le visage. Il y aura de grandes et redoutables absences. Que se taise la voix qui chuchote tout au long des années présentes et annonce la fin de l'Eglise ! L'Eglise sera-t-elle seulement visible ? La question n'est pas de savoir si elle ne sera plus, car il faut qu'elle soit, mais sous quelle forme ? Que croira-t-on ? Finis les chants, les cérémonies aux gestes lents, les ors sur les chapes, l'encens montant vers les voûtes avec les paroles latines. Déjà cela n'est plus"

Note personnelle: A partir de l'année 68, Julien Green va vraiment beaucoup se plaindre de l'évolution de l'Église, tout en s'accrochant à elle... c'est parfois très triste. Moi aussi, j'éprouve quelques regrets, puisque j'ai servi la messe en latin, durant mes très jeunes années. Quant à la question : "sous quelle forme ?", j'ai le souvenir d'une citation, mais quel en est l'auteur ? En tout cas, cela disait: "Lorsqu'il n'y a plus de saints, il y a des persécutions et des martyres, mais l'Église ne passe pas"

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Message par etienne lorant Mer 8 Déc 2010 - 16:35

22 novembre 1967
"Lundi, je devais recevoir un religieux, à six heures de l'après-midi. J'avais déjà une visite, un ami que je vois souvent. Je lui dis: "Il est six heures moins le quart, reste jusqu'à six heures moins le quart, reste jusqu'à ce que mon franciscain soit là." Mais il préfère partir, ouvre la porte, trouve le religieux assis la chasse du palier, lui demande d'entrer. Le religieux répond avec un sourire : "Mr. Green m'a dit six heures, et j'attends qu'il soit six heures". "Mais il fait froid là". "Cela n'est rien", dit le frère avec humilité. Il est enfin entré et seul avec moi m'a fait la confidence de ses difficultés... Il parle simplement, doucement, avec un sourire d'enfant, me dit qu'il garde l'espérance et n'a jamais pensé qu'il serait perdu; sur ce point, je suis entièrement d'accord avec lui. Il est plus près de la sainteté que beaucoup de catholiques qui sont la rigueur même et se prennent personnellement pour l'Eglise."

Note personnelle: j'en ai souvent voulu au frère franciscain qui n'a pas su me recevoir, une semaine après ma conversion, simplement parce qu'il doutait, parce qu'il avait connu une rupture professionnelle (il avait été directeur d'un collège, et il ne savait pas me répondre. Il n'avait plus sa robe de bure, mais un costume "clergyman" dans lequel je ne l'avais moi-même pas reconnu. Cependant, j'étais décidé à rentrer dans l'ordre franciscain. Je lui ai raconté tout l'épisode de ma conversion - avec le côté "surnaturel" qui avait achevé de me convertir- et je lui ai demandé: j'ai besoin d'un lieu pour réapprendre à marcher dans le monde, puisque je me sens comme un tout petit enfant, qui ne sait plus comment marcher. (Dans mon idée, il allait me recevoir, me laisserait me "re-familiariser" avec les offices, puis parler avec lui de l'avenir.) Mais surtout et avant tout, j'attendais une confession - qu'il me la propose, bon sang ! Mais il n'était plus le même - il n'avait plus le même 'éclairage surnaturel' que je lui avais vu lorsque j'étais étudiant : il ordonnait, et pas un seul n'osait désobéir, sa voix gouvernait plus que la tête, mais aussi les cœurs

Mais bref, c'étaient les années 80, il avait eu son apprentissage de la "modernité" et ... un peu oublié la totale humilité de saint François. Qu'importe. Je lui ai tout pardonné dans mon âme, l'an dernier, lorsque j'ai appris que lors de l'épisode de Dunkerque (l'invasion allemande) ils étaient six à marcher depuis des semaines et aider tout un chacun, et ont failli se faire fusiller comme appartenant à la "cinquième colonne".

Ce franciscain vit toujours, plus pour longtemps, bien sûr, mais Dieu le bénisse !
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Message par etienne lorant Mer 8 Déc 2010 - 16:36

28 novembre 1967
Aujourd'hui, conversation à la radio avec Jean-François Noël. Je lui dis: "N'est-il pas curieux qu'en 1967, on puisse attirer l'attention sur soi en parlant des vérités du catéchisme ? On a l'air d'un étranger venu d'un pays lointain et qui garde l'accent de ces régions-là. Je lui cite des phrases de Nietzsche sur le souffle du vide qui frappe le visage de l'incroyant, puisque "Dieu est mort"


Note personnelle: Je me souviens d'une réflexion de Dostoïevski qui écrivait : "A partir du moment où les hommes auront déclaré "la mort de Dieu", il se jetteront les uns sur les autres pour s'embrasser comme s'ils voulaient se consoler, et ils se mettront à chérir et à vouloir protéger le moindre brin d'herbe." Je considère la question de l'écologie comme un sujet important, certes, mais cela ne va pas plus loin, pour moi, que d'essayer de trier mes déchets. Cependant, je connais certains militants écologiques pour qui l'écologie est devenue une forme de religion à part entière, comme s'ils se disaient, nous n'avons pas pu croire en Dieu, alors essayons de croire en la terre ? Mais cela me semble en même temps dérisoire et pitoyable...

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Message par etienne lorant Mer 8 Déc 2010 - 16:40

26 décembre 1967
"Lu dans le père Lallemant une page d'une concision remarquable qui résume selon moi toute vie spirituelles : "Il n'y a que Dieu qui ait droit de souveraineté sur les cœurs. L'Église même n'étend pas jusque-là son domaine. Ce qui s'y passe ne relève point d'elle. Dieu seul en est le Roi... C'est là qu'il établit le trône de sa grâce... Dieu s'applique plus au gouvernement surnaturel d'un cœur où il règne qu'au gouvernement naturel de tout l'Univers... Il n'y a que Dieu qui puisse contenter notre cœur. Notre cœur a un vide qui ne peut être rempli que de Dieu. Les délices de Dieu sont de converser avec les cœurs. C'est là son lieu de repos. Heureuse la vie intérieure qui fait vivre Dieu seul dans les cœurs."

Note personnelle: Puisse donc Dieu régner dans mon cœur de plus en plus. Car le vide qui est dans mon cœur est de plus en plus le vide, à mesure que toutes les autres relations sont chargées d'inquiétudes, de reproches, de peurs, de suspicions.

Il y a trois jours, quand j'ai décidé d'un seul coup, de trancher au vif dans les liens déjà très amoindris d'avec mes sœurs, c'est que j'avais entendu - six fois au cours de cet appel le mot de "colère": il n'est même plus nécessaire d'explications, de discussion, le mot de colère justifie tout. J'ai conclu aussitôt que c'en était fini des tentatives de rapprochement étalés sur plus d'une dizaine d'années. J'ai dit ce que j'avais à dire et cela fut dit en moins d'une minute. Mais j'ai prié une partie de la nuit qui a suivi je me suis arrêté de compter après trente dizaines de chapelet... je me suis finalement endormi.) Le lendemain matin, j'ai repris le travail comme à l'ordinaire et je me plaignais déjà de n'avoir pas reçu de réponse à ma prière lorsque j'ai ressenti, très fortement: "Désormais, il te faut mourir à toi-même".

J'ai eu la connaissance de ce que cela voulait dire: je dois me dépouiller de mes dernières affections que le monde dit 'légitimes': famille, conjoint, amitiés et jusqu'aux décors du passé... Désormais, il faudra aimer ce prochain à propos duquel Simone Weil déclarait avec une très grande clarté: "Pour aimer un étranger comme soi-même, cela présuppose de se considérer soi-même comme un étranger. Il faut la foi, la prière, la discipline - et Dieu viendra combler ce vide si pénible à endurer pour le moment.

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Message par etienne lorant Sam 11 Déc 2010 - 12:20

28 novembre 1967
Aujourd'hui, conversation à la radio avec Jean-François Noël. Je lui dis: "N'est-il pas curieux qu'en 1967, on puisse attirer l'attention sur soi en parlant des vérités du catéchisme ? On a l'air d'un étranger venu d'un pays lointain et qui garde l'accent de ces régions-là. Je lui cite des phrases de Nietzsche sur le souffle du vide qui frappe le visage de l'incroyant, puisque "Dieu est mort"


Note personnelle: Je me souviens d'une réflexion de Dostoïevski qui écrivait : "A partir du moment où les hommes auront déclaré "la mort de Dieu", il se jetteront les uns sur les autres pour s'embrasser comme s'ils voulaient se consoler, et ils se mettront à chérir et à vouloir protéger le moindre brin d'herbe." Je considère la question de l'écologie comme un sujet important, certes, mais cela ne va pas plus loin, pour moi, que d'essayer de trier mes déchets. Cependant, je connais certains militants écologiques pour qui l'écologie est devenue une forme de religion à part entière, comme s'ils se disaient, nous n'avons pas pu croire en Dieu, alors essayons de croire en la terre ? Mais cela me semble en même temps dérisoire et pitoyable...

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Message par etienne lorant Sam 11 Déc 2010 - 12:23

26 décembre 1967
"Lu dans le père Lallemant une page d'une concision remarquable qui résume selon moi toute vie spirituelles : "Il n'y a que Dieu qui ait droit de souveraineté sur les cœurs. L'Église même n'étend pas jusque-là son domaine. Ce qui s'y passe ne relève point d'elle. Dieu seul en est le Roi... C'est là qu'il établit le trône de sa grâce... Dieu s'applique plus au gouvernement surnaturel d'un cœur où il règne qu'au gouvernement naturel de tout l'Univers... Il n'y a que Dieu qui puisse contenter notre cœur. Notre cœur a un vide qui ne peut être rempli que de Dieu. Les délices de Dieu sont de converser avec les cœurs. C'est là son lieu de repos. Heureuse la vie intérieure qui fait vivre Dieu seul dans les cœurs."

Note personnelle: Puisse donc Dieu régner dans mon cœur de plus en plus. Car le vide qui est dans mon cœur est de plus en plus le vide, à mesure que toutes les autres relations sont chargées d'inquiétudes, de reproches, de peurs, de suspicions.
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Message par etienne lorant Sam 11 Déc 2010 - 12:25

15 janvier 1968
"Dans un livre de Jacques Cabaud sur Simone Weil, je note cette phrase: "Plus est réel le désir de Dieu... plus est violent le soulèvement de la partie médiocre de l'âme; soulèvement comparable à la rétraction d'une chair vivante qu'on serait sur le point de mettre dans du feu". La première partie de cette phrase, au moins, décrit exactement mon expérience et surtout mes déboires spirituels".

Note personnelle
Comme j'ai été joyeux de découvrir que Julien Green a lu - aussi - Simone Weil. Mes deux meilleurs amis réunis dans une phrase du Journal ! Comprenez-vous pourquoi j'ai appelé ces petites phrases de ce Journal une "aide à l'intériorité" ?
Du reste, ce soulèvement de la partie médiocre de l'âme, elle commence comme je l'avais remarqué l'autre jour par la résistance subite qui se manifeste lorsque l'on se dit: "Allons, je vais prier un peu". Incroyable comme, tout d'un coup, une multitude de choses à faire se rappellent à la mémoire ! Alors, on a beau s'empresser de dégager la table de travail... la grâce que le Seigneur nous tendait... elle est passée, il faut attendre qu'elle revienne... car prier est une grâce. Si prier n'était pas une initiative de Dieu en nous (oui, oui, bien sûr, c'est surnaturel !) nous ne prierions jamais.

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Message par etienne lorant Sam 11 Déc 2010 - 12:32

Je songe aux jours où la prière semble aller de soi. Elle est alors comme une fontaine qui n'attend que de couler. Ce sont des temps que je crois nécessairement liés au secours de l'Esprit-Saint, car en ces heures-là, qui se succèdent pratiquement toute la journée, sans fatigue mais avec douceur, la prière est comme une seconde respiration. Mais il y a les lendemains ! Prier redevient tout d'un coup comme un labeur pénible. C'est comme se retrouver dans le désert et sucer un caillou pour avoir un peu de salive: c'est difficile et rebutant. Mais il faut que je m'y mette tout de même, sans quoi la journée serait perdue ! "Par vous-mêmes, vous ne pouvez rien faire", dit Jésus. Aussi, il faut veiller et prier beaucoup, et cela en tous temps.
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Message par etienne lorant Lun 13 Déc 2010 - 16:35

15 janvier 1968
"Dans un livre de Jacques Cabaud sur Simone Weil, je note cette phrase: "Plus est réel le désir de Dieu... plus est violent le soulèvement de la partie médiocre de l'âme; soulèvement comparable à la rétraction d'une chair vivante qu'on serait sur le point de mettre dans du feu". La première partie de cette phrase, au moins, décrit exactement mon expérience et surtout mes déboires spirituels".


Note personnelle
Comme j'ai été joyeux de découvrir que Julien Green a lu - aussi - Simone Weil. Mes deux meilleurs amis réunis dans une phrase du Journal ! Comprenez-vous pourquoi j'ai appelé ces petites phrases de ce Journal une "aide à l'intériorité" ?
Du reste, ce soulèvement de la partie médiocre de l'âme, elle commence comme je l'avais remarqué l'autre jour par la résistance subite qui se manifeste lorsque l'on se dit: "Allons, je vais prier un peu". Incroyable comme, tout d'un coup, une multitude de choses à faire se rappellent à la mémoire ! Alors, on a beau s'empresser de dégager la table de travail... la grâce que le Seigneur nous tendait... elle est passée, il faut attendre qu'elle revienne... car prier est une grâce. Si prier n'était pas une initiative de Dieu en nous (oui, oui, bien sûr, c'est surnaturel !) nous ne prierions jamais.

En 2009 eut lieu le centenaire de la naissance de Simone Weil, occasion de redécouvrir cette personnalité attachante dont l'intransigeance dans la quête de la vérité aboutit à la rencontre avec le Christ. Elle a des paroles terribles de concision mais fortes et bonnes:
"Le Christ aime qu'on lui préfère la vérité, car avant d'être le Christ, il est la Vérité. Si on se détourne de lui pour aller vers la vérité,
on ne fera pas un long chemin sans tomber dans ses bras."

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Message par etienne lorant Lun 13 Déc 2010 - 16:36

16 janvier 1968.-
"Hier, ayant ouvert au hasard pour essayer d'avoir des nouvelles du "Pays perdu", le livre de dom Cuthbert Butler, "Le Mysticisme d'Occident", je suis tombé sur ce passage que je retraduis en français puisque, dans ce livre anglais, il est cité comme ayant été écrit en français par la mère Isabelle Daurelle, Carmélite morte en 1914: "Pendant la prière du soir, le troisième jour, je pénétrai à l'intérieur de mon âme, et il me parut que je descendais dans les vertigineuses profondeurs d'un abîme où j'eus l'impression d'être entourée d'un espace sans limites. Je sentis alors la présence de la Sainte Trinité et me rendis compte de mon propre néant que je compris mieux que jamais auparavant. Cette connaissance me fut très douce. La divine Immensité dans laquelle je fus plongée et qui me remplit avait la même douceur...". J'ai refermé le livre et je me suis senti dans un autre monde, non seulement à ce moment-là, mais toute la journée. Ce livre rend le goût de Dieu que le péché et l'égoïsme nous font perdre"

Note personnelle:
Cette lecture ne m'a pas vraiment surpris, car je la retrouve régulièrement chez sainte Faustine, et chez d'autres mystiques. Tous parlent d'un moment où ils prennent conscience "plus que jamais" de leur propre "néant" devant Dieu (ce sont quasiment toujours les mêmes termes), mais ils ne s'y sentent pas noyés ou perdus comme ils l'avaient craint au commencement de l'expérience - au contraire, l'anéantissement perd tout côté négatif pour devenir contemplation remplie d'amour et d'humilité. C'est, par exemple, ce qui fit dire à sainte Faustine: "Il n'y aura jamais assez de toute l'éternité pour pénétrer l'inconcevable profondeur des mystères de l'Amour". D'autres disent qu'ils auraient préféré souffrir 'mille morts' plutôt que de sortir de cet état, d'autres encore s'étonnent, comme David dans le Psaume : "Mais qu'est donc l'homme, Ô Dieu, pour que Tu t'intéresses à lui"... Et moi-même, qui refusait de me convertir, justement parce que je me disais: comment Dieu pourrait-il prêter attention à un homme sur six milliards !"

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Message par etienne lorant Lun 13 Déc 2010 - 16:37

22 janvier 1968
'Pensé à Baudelaire qui pour écrire ses poèmes semble s'être servi des mots dont personne ne voulait, les plus ordinaires, et leur a conféré une noblesse incomparable
'

Note personnelle.
Je n'avais jamais songé à cela. J'ai repris un volume des "Fleurs du Mal" et en lisant "L'Horloge", j'ai trouvé qu'en effet, le poète a employé des mots simples (mise à part la sylphide, peut-être) pour parvenir à un fantastique puissant:


L'horloge

Horloge! dieu sinistre, effrayant, impassible,
Dont le doigt nous menace et nous dit : "Souviens-toi !"
Les vibrantes Douleurs dans ton cœur plein d'effroi
Se planteront bientôt comme dans une cible;

Le plaisir vaporeux fuira vers l'horizon
Ainsi qu'une sylphide au fond de la coulisse;
Chaque instant te dévore un morceau du délice
A chaque homme accordé pour toute sa saison

Trois mille six cents fois par heure la Seconde
Chuchote: Souviens-toi!- Rapide, avec sa voix
D'insecte, Maintenant dit : Je suis Autrefois,
Et j'ai pompé ta vie avec ma trompe immonde!

Remember! Souviens-toi! Prodigue! Esto memor!
( Mon gosier de métal parle toutes les langues.)
Les minutes, mortel folâtre, sont des gangues
Qu'il ne faut pas lâcher sans en extraire l'or!

Souviens-toi que le Temps est un joueur avide
Qui gagne sans tricher, à tout coup! c'est la loi,
Le jour décroît; la nuit augmente; souviens-toi!
La gouffre a toujours soif; la clepsydre se vide,

Tantôt sonnera l'heure où le divin Hasard,
Où l'auguste Vertu, ton épouse encore vierge,
Où le Repentir même ( oh! la dernière auberge! ),
Où tout te dira : Meurs vieux lâche! il est trop tard!

Charles Baudelaire (Les fleurs du mal)

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Message par etienne lorant Mar 14 Déc 2010 - 13:38

2 mai 1968
'Luther disait : il arrive que Dieu en ait assez de la partie et qu'il jette les cartes sous la table. Je me demande si ce n'est pas ce qui se passe aujourd'hui. On croit, c'est la tendance nouvelle, que l'enfer étant vide, d'après l'abbé Mugnier (il ne prévoyait certes pas la fortune de son mot) le corollaire de ce théorème est que tous les hommes sont sauvés. J'aurais intérêt à le croire, comme tout le monde, mais je me demande de quelle utilité peuvent être alors le baptême où l'Eglise chrétienne. Saint Paul dit que pour être sauvé il faut la foi. Nous avons changé tout cela. il n'empêche que je redis souvent la prière du père de Foucauld: "Seigneur, faites que tous les hommes soient sauvés..." puisque c'est aussi ce que vous voulez.

Note personnelle: J'ai rarement souffert comme aujourd'hui, mais tout autant, j'ai rarement reçu autant de force pour me lever et accomplir, ce matin et cet après-midi, tout ce que je pouvais faire. Je regrette un peu que cette exploration du Journal de Julien Green recueille moins d'intérêt qu'autrefois. Mais qu'est-ce que çà peut faire, dans le fond. Car ce travail est aussi celui qui s'effectue en moi-même, chaque jour, et me remet en question. Aujourd'hui, je me suis souvenu de ce signe de croix de la Miséricorde qui fut pour moi le fruit (pas le seul j'espère) de mon engagement religieux: "Au nom de la miséricorde du Père, dont le Fils m'a illuminé, je prie l'Esprit Saint de susciter l'Amour en mon coeur, Amen".


Dernière édition par etienne lorant le Mar 14 Déc 2010 - 13:43, édité 1 fois
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Message par etienne lorant Mar 14 Déc 2010 - 13:39

5 et 7 décembre 1968
"Lundi, avec Anne à la maison Sainte Odile, rue Saint-Guillaume, en face des Sciences Po, pour voir une religieuse américaine de passage à Paris. Elle nous attendait debout à la porterie, toute petite maintenant et son voile noir laissant passer ses cheveux blancs, touchante par la fidélité de son affection. Elle a quatre-vingt-dix ans et m'a fait sauter tout enfant sur ses genoux. Nous ayant d'abord bien embrassés, elle nous mène par un somptueux escalier Louis XIV à un couloir étroit que nous suivons jusqu'à une petite pièce encombrée de fauteuils et dont le parquet brille comme un miroir. C'est en anglais qu'elle nous parle, avec cet accent de Philadelphie qui me reporte aux bons jours de la rue de Passy, aux éclats de rire, à la joie qu'il y avait dans cet appartement un peu sombre. Que de souvenirs échangés...
Un glaucome l'a privée d'un œil et l'autre est menacé, "mais je verrai clair au paradis !" nous dit-elle. J'admire cette merveilleuse assurance du salut, cette foi inébranlable, inentamée par le siècle... Elle était née protestante. Comment est-elle devenue catholique ? demande Anne. "Je ne sais plus. Si. Il y avait chez Miss Hess une très bonne catholique avec qui je m'entretenais, c'est tout".
--
A la campagne. Je me souviens que notre amie de la maison Sainte-Odile nous disait: "Nous autres convertis, nous avons une fois qui n'est pas celle des catholiques nés dans le catholicisme. Souvent, nous tenons plus fermes qu'eux." "C'est qu'il nous a été difficile de passer d'une Église à l'autre, et nous nous raccrochons à notre fois, alors qu'eux la laissent plus facilement partir."

Note personnelle.
Je me rappelle de quelques lignes laissées par Julien Green qui s'est lui-même converti au catholicisme, dès l'âge de seize ans. Une opinion éclairée d'un commentateur: s'il reconnaît que son milieu la préparait (principalement sa mère), Julien Green affirme surtout qu'une conversion commence bien avant qu'elle ne se manifeste à la conscience et qu'elle n'est jamais vraiment achevée, car c'est une lente métamorphose que Dieu fait de notre âme selon sa divine volonté. Aussi se poursuit-elle dans la nuit de la misère du pécheur, sans cesse pourchassé par Satan dont la présence hante Julien Green. Enfin, pour l'écrivain Green, l'acte de création littéraire, totalement mystérieux, participe à ce travail de conversion que Dieu opère dans le fond de l'âme et par lequel l'auteur se découvre à lui-même celui qu'il doit être. Personnellement, j'ai écrit - en me basant sur des mots de l'auteur, que ce Journal fut un instrument de veille en ce monde, qui lui permit souvent de "renflouer l'épave spirituelle". La question que je me pose, c'est pourquoi un protestant converti serait plus armé pour la lutte qu'un catholique... Je suis moi-même converti, converti de la tiédeur de ma jeunesse catholique, et aussi d'une effroyable tentation de rationalisme. Il m'arrive souvent de dire avec le saint Curé d'Ars: quand bien même, on me prouverait de manière absolue que Dieu n'existe pas, je ne saurais m'empêcher de le prier.

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Message par etienne lorant Mar 14 Déc 2010 - 13:47

Comme le texte lu hier mentionnait la conversion de Julien Green à l'âge de seize ans (un an après le décès de sa mère), j'ai fouiné un peu (fouiner: terme de bouquiniste se rapportant à un 'fouillis' de bouquins !) dans mes petites réserves et j'ai retrouvé le passage de "Jeunes années", dans lequel l'auteur rapporte ce tournant de sa vie, tel qu'il s'en souvient. Le récit démarre sur les rapports assez froids que Julien avait entretenu avec son père et ensuite une découverte capitale dans la chambre paternelle.

"Un jeudi après-midi que je travaillais dans sa chambre à je ne sais quoi, l'idée me vint tout à coup d'aller dans la salle de bains. Je me mis à penser à ma mère et il me sembla que d'une façon inexplicable elle était présente. Comment décrire ces impressions que les mots ne peuvent que maladroitement désigner ? Dès qu'on essaie d'en parler, elles paraissent s'évanouir dans un sorte de brume où le langage ne les atteint pas. J'attendis un moment devant le meuble où mon père rangeait ses chemises, puis par une impulsion subite, j'écartais un des rideaux. Sous une des chemises, à moitié dissimulé, comme un objet qu'on veut garder pour soi, un livre attira mon attention.
C'était un abrégé de toute la doctrine catholique à l'usage des nouveaux convertis, par le Cardinal Gibbons, de Baltimore. je commençai à le lire. Immédiatement ? Je ne sais pas, je ne me rappelle plus, mais, ce que je puis affirmer, c'est que dans l'espace de dix à quinze jours", j'avais dévoré le livre entier. Depuis le premier mot jusqu'au dernier, je crus tout ce qui était contenu dans ces pages, je le crus avec force et avec joie. Il me sembla qu'alors que je mourais de soif, une eau fraîche m'était versée d'une source intarissable, une eau délicieuse qui répandait la joie. Ce que je voulais savoir, je le savais enfin, ce que je voulais croire m'était prodigué, je regrettais seulement qu'il n'y en eût pas plus. Cette eau plus enivrante que le vin me transforma d'un seul coup, je devins catholique de désir, sans hésitation aucune, dans un immense élan vers Dieu."


Je cesse de recopier ici. La suite, c'est que le père du petit Julien lui avoua être catholique 'depuis le 15 août dernier' et qu'il s'occupa de lui faire connaître un religieux qui "s'occupa de son instruction"... Ayant bien connu le pasteur qui habitait mon quartier (il est aujourd'hui reparti en Suisse), j'ai eu la surprise un jour qu'il me demande si je croyais en la Présence Réelle... C'est par lui que j'ai appris, au moins en partie, ce qui différencie les catholiques des protestants. A la question posée, je répondis que je n'étais pas théologien, mais fondamentalement, si le Seigneur a dit : là où deux où trois se réunissent en mon nom, je suis au milieu d'eux", comment croire qu'Il est absent lorsque les croyants se réunissent pour célébrer le jour où Il a dit: "Ceci est mon corps, et ceci est mon sang" ? J'appris aussi que Marie ne saurait être distinguée des autres femmes (ah bon ?). Mais le plus important, je n'en sus rien avant des années: la non-existence du purgatoire est une chose terrible. C'est très simplificateur aussi de dire que la foi seule peut nous sauver. Julien Green se rendit vite compte, après son adhésion à la foi catholique, que commettre des péchés peut séparer de Dieu en dépit de la foi déclarée. Jusqu'alors, c'était simple: je suis protestant, j'ai la foi, je suis donc sauvé (et en quelque sorte peu importent les mauvais penchants auxquels je cède si souvent, puisque j'ai toujours la foi...)
Mon ami pasteur essaya, mais en vain, de me faire quitter l'Église catholique (et sans le savoir) il m'en rapprocha. Dommage, car il y avait chez lui une porte ouverte et une entraide que je ne trouvais pas lors de réunions avec d'autres catholiques.
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Message par etienne lorant Mar 14 Déc 2010 - 13:48

27 janvier 1969
A propos de la foi, quelqu'un me redit cette phrase spécieuse et suspecte qui est en circulation depuis quelque temps, à savoir que 'beaucoup se figurent avoir la foi et ne l'ont pas', formule propre à semer le doute: c'est d'ailleurs son objet. La réponse est que la preuve de la foi, c'est le changement radical de la vie.
30 janvier 1969
La phrase malfaisante sur ceux qui croient avoir la foi sans l'avoir, s'accompagne de cette autre, qui est vraie et semble continuer la première, qui est fausse : 'beaucoup pensent n'avoir pas la foi, qui l'ont malgré tout'. C'est en mélangeant le vrai au faux qu'on fait passer le faux.
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Message par etienne lorant Mar 14 Déc 2010 - 13:54

4 février 1969
Lu le livre d'Urs von Balthasar sur soeur Elisabeth de la Trinité. Il y a sur la prédestination des pages qui me frappent comme quelque chose qui me serait tout à coup révélé. L'Église est prédestinée et si l'on est dans l'Église, qui est universelle, on est sauvé. Le salut personnel ne devrait pas nous tourmenter.C'est un problème réintroduit dans le courant de nos idées, sans doute au XVIème siècle. La même religieuse cite une parole admirable qui est une des plus belles définitions possibles de la foi: "C'est le face à face dans les ténèbres". Tout est dit en quelques mots. Je ne sais si cette carmélite aura la popularité de sainte Thérèse de Lisieux Elle part trop haut pour qu'on puisse la suivre, elle vole comme une flèche vers la Sainte Trinité.

Note personnelle: Il doit s'agir de ce livre: H. Urs von Balthasar, Élisabeth de la Trinité et sa mission spirituelle. Ed. du Seuil, 1959 (ouvrage réédité). Un peu difficile pour moi, je le crains, mais il peut intéresser d'autres. Elisabeth de la Trinité a été béatifiée en 1984, le 25 novembre. J'ai retrouvé l'homélie du Pape Jean-Paul II prononcée en cette occasion:

Presque contemporaine de Thérèse de l'Enfant-Jésus, Élisabeth de la Trinité fait une expérience profonde de la présence de Dieu, qu'elle mûrit de manière impressionnante en quelques années de vie au Carmel. accomplie, appréciée de ses amis, délicate dans l'affection des siens. Voici qu'elle s'épanouit dans le silence de la contemplation, rayonne du bonheur d'un total oubli de soi ; sans réserve, elle accueille le don de Dieu, la grâce du baptême et de la réconciliation; elle reçoit admirablement la présence eucharistique du Christ. A un degré exceptionnel, elle prend conscience de la communion offerte à toute créature par le Seigneur.

Nous osons aujourd'hui présenter au monde cette religieuse cloîtrée qui mena une « vie cachée en Dieu avec Jésus-Christ » (Col 3, 3) car elle est un témoin éclatant de la joie d'être enraciné et fondé dans l'amour (cf. ép. 3, 17). Elle célèbre la splendeur de Dieu, parce qu'elle se sait habitée au plus intime d'elle-même par la présence du Père, du Fils et de l'Esprit en qui elle reconnaît la réalité de l'amour infiniment vivant.

Élisabeth a connu elle aussi la souffrance physique et morale. Unie au Christ crucifié, elle s'est totalement offerte, achevant dans sa chair la passion du Seigneur (cf. Col 1, 24), toujours assurée d'être aimée et de pouvoir aimer. Elle fait dans la paix le don de sa vie blessée.

A notre humanité désorientée qui ne sait plus trouver Dieu ou qui le défigure, qui cherche sur quelle parole fonder son espérance, Élisabeth donne le témoignage d'une ouverture parfaite à la Parole de Dieu qu'elle a assimilée au point d'en nourrir véritablement sa réflexion et sa prière, au point d'y trouver toutes ses raisons de vivre et de se consacrer à la louange de sa gloire.

Et cette contemplative, loin de s'isoler, a su communiquer à ses sœurs et à ses proches la richesse de son expérience mystique. Son message se répand aujourd'hui avec une force prophétique. Nous l'invoquons : disciple de Thérèse de Jésus et de Jean de la Croix, qu'elle inspire et soutienne toute la famille du Carmel ; qu'elle aide beaucoup d'hommes et de femmes, dans la vie laïque ou la vie consacrée, à recevoir et partager les « flots de charité infinie » qu'elle recueillait « à la fontaine de vie ».

Alors qu'elle porte son regard sur ces trois hautes figures, l'église désire aujourd'hui professer la foi apostolique au règne du Christ, affirmer qu'elle croit que vraiment il règne.

Car le Christ « est ressuscité d'entre les morts pour être parmi les morts le premier ressuscité » (1 Co 15, 20). Dans l'histoire des hommes vaincus par la mort, il a, le premier, remporté la victoire sur la mort. C'est une victoire pour lui - et en même temps c'est une victoire pour nous.

« C'est en Adam que meurent tous les hommes ; c'est dans le Christ que tous revivront. » (1 Co 15, 22.) Tous ceux qui lui appartiennent par la grâce et l'amour ont en eux la vie nouvelle : la vie du royaume que le Père a préparé « depuis la création du monde ».
Dans cette vie nouvelle s'épanouira la victoire du Christ sur tout ce qui est contraire au règne de Dieu dans la création visible et invisible. « C'est lui, en effet, qui doit régner jusqu'au jour où « il aura mis sous ses pieds tous ses ennemis ». Et le dernier ennemi qu'il détruira, c'est la mort. » (1 Co 15, 25-26.)


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Message par etienne lorant Mar 14 Déc 2010 - 13:56

30 mars 1969
'Hier un prêtre me parle des catholiques contestataires qui se figurent que le christianisme, c'est eux. Le Christ, a été, disent-ils, l'allumette qui a tout fait flamber, mais il n'est qu'un personnage historique. Reste non pas une morale, mais une philosophie politique agressive qu'on veut faire passer pour de la religion'

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Message par etienne lorant Mer 15 Déc 2010 - 16:24

11 juillet 1969
"Ces livres sur les mystiques, on les lit transporté de ferveur et cela dure quelques jours; puis la vie, avec ses dix mille voix, vous crie autre chose qui est quelquefois Dieu et souvent ne l'est pas du tout. Les belles impressions de spiritualité s'effacent. Le rêve divin se dissipe, parce que la foi n'est pas toujours aussi triomphante et parce que nous ne souffrons pas que Dieu se cache. Alors que Mère Yvonne-Aimée de Jésus, elle, a dû souffrir une nuit obscure de huit années sans consolation aucune, nous, il faut que le Seigneur nous porte comme des bébés et dès qu'il nous met à terre pour qu'enfin nous marchions, que nous apprenions à marcher, c'est fini, chute désespoir. J'exagère à peine. En lisant la vie de cette religieuse, comment ne pas se demander qui est sauvé ? Les âmes prédestinées et aux prix de quels crucifiants efforts. Et les autres ? Les autres aussi, je le crois, je l'espère."
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Message par etienne lorant Mer 15 Déc 2010 - 16:41

27 septembre 1969
'Dans Jérémie, XI, 3, le Seigneur dit à Israël: "Je t'ai aimé d'un amour éternel...' Cette déclaration d'amour de Dieu à chacun de nous, car c'est de cela qu'il s'agit - Israël, c'est toi qui lis ces mots - qui donc y pense ? Nous traversons le monde pour aimer Dieu qui nous le fait savoir presque sans cesse, je dis presque, parce que nous ne voulons pas le savoir.'
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Message par giorgino Mer 15 Déc 2010 - 17:52

Bonsoir ,
Je me souviens d'avoir lu " Moïra " de lui , le roman se termine mal ! Mais le roman était prenant .

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Message par Fée Violine Mer 15 Déc 2010 - 18:10

Moi j'ai lu "Mont Cinère", qui est très sombre aussi. Sa vision du monde n'était pas très joyeuse...
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Message par etienne lorant Jeu 16 Déc 2010 - 9:30

J'ai lu les deux romans, et c'est vrai qu'il faut s'armer de bonne humeur !!!
Moïra se fait assassiner par son amoureux qui veut à tout prix la protéger et se protéger lui-même du "péché" - et dans le second, la maison brûle essentiellement à cause de l'avarice qui les rongeait tous. Mais la plupart des romans de Julien Green sont à lire au "second degré".

Je m'étonne un peu que personne ne réagisse - du moins pas souvent, aux notes du Journal, qui est la seule œuvre qui m'ait accroché à ce point. Il faut dire qu'à partir de quelques notes, on peut partir dans de multiples directions, découvrir des œuvres d'art, lire d'autres auteurs, bref voyager dans le temps et dans l'espace. Le prénom de Moïra symboliserait le Destin, mais Moïra est aussi une forme anglicisée du prénom irlandais Maire, ou: Maired, signifiant Marie ! Le titre Mont-Cinère a sans doute été emprunté au Lac de Mont-Cineyre, en Auvergne où l'auteur avait pris des vacances. Le roman est sombre, mais il est prenant, car très bien écrit. On se demande toujours: mais quand donc Emily va-t-elle réagir ? Pourquoi ne pas fuir, plutôt ? Je l'ai lu en deux jours et j'avais rarement été saisi aussi fortement dans une intrigue.



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Message par etienne lorant Jeu 16 Déc 2010 - 13:15

19 octobre 1969
Soeur Edith Stein, juive et Carmélite, née à Breslau en 1893, morte à Auschwitz, dans les chambres à gaz, en 1942. Elle se trouvait en Hollande quand elle a été arrêtée. L'homme de la Gestapo, qui venait faire une enquête dans le Carmel où se trouvait la religieuse, a dit en levant la main: "Heil Hitler !" Elle pouvait lâchement murmurer ces paroles idiotes; elle a tenu entre ses mains, cette fille d'Israël, l'honneur de l'Eglise en Allemagne, et elle a répondu d'une voix claire: "Loué soit le Seigneur Jésus-Christ ! Elle devait passé en Suisse où elle eut été en sécurité. Elle a préféré confesser Jésus-Christ à la face du démon et du monde qui était derrière lui."
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